Et si les fleurs vous donnaient l’heure ?

Marc Buchy est un artiste plasticien originaire de Metz, résidant en Belgique depuis plus de 15 ans. Sa dernière œuvre intitulée « L’horloge de flore » qu’il dévoilera lors de la 9ème édition des 24h du temps, attisera sans aucun doute la curiosité des Bisontins. Nous sommes partis à sa rencontre pour qu’il nous en dise un peu plus sur cette majestueuse horloge de flore qui prendra place pour l’été dans le parc des Glacis à Besançon.

C’est la première fois que vous venez aux 24h du temps ?

L’intégration de mon projet dans la programmation des 24h du temps est assez fortuite ! L’horloge de Flore est une œuvre réalisée dans le cadre du programme « Les Mondes Nouveaux », un plan de relance artistique post-covid. Financés par le Ministère de la Culture, les  projets artistiques devaient être en dialogue avec des monuments nationaux présents sur tout le territoire.

J’ai proposé de travailler avec l’horloge astronomique de Besançon. C’était le point de départ pour s’intégrer à la ville. J’ai proposé de faire un espace de cadran floral complémentaire à cette horloge. Je suis allé cherché les écrits du naturaliste suédois Carl Von Linné, datant de 1750.  Il a été un des premiers à faire de la taxonomie, à classifier le réel, la nature, à mesurer et rendre toute la nature « disponible et utilisable ». D’une certaine façon, ce sont les bases de la modernité, tout comme l’horloge astronomique ou la mathématisation du temps… Et Linné a envisagé la chronobiologie dans ses écrits.

Qu’est-ce que la chronobiologie ?

Carl Von Linné s’est rendu compte que les fleurs d’espèces différentes n’ouvraient pas leurs coroles en même temps dans la journée. Certaines s’ouvrent le matin, le midi, d’autres le soir… L’idée était qu’en réunissant des espèces de plantes au même endroit, on pourrait estimer le passage du temps en regardant le mouvement de ces fleurs et ces plantes. J’ai donc mis en application ses recherches en les actualisant ou les replaçant dans des perspectives critiques et dans notre époque contemporaine.

Bien sûr, il n’y a pas une fleur qui s’ouvre à 8 heures, une autre à 9 heures… ça n’existe pas ! Donc, ce que nous avons pu faire, c’est avoir une ouverture progressive entre les matinales, les diurnes et les nocturnes de l’est à l’ouest – comme le passage des astres. Cela traduit un certain rapport à la nature et à la réalité des choses.

Qu’est-ce que « l’horloge de flore » concrètement ? Comment avez-vous élaboré ce projet ? Avec qui ?

L’horloge est un parterre de fleurs de 1 333 m², avec 30 espèces qui a été réalisé par deux paysagistes – Michel Pena et Eva Maric – ainsi que ethnobotaniste Gil Ferrand. Des  collaborations locales ont été importantes pour la réussite : la participation d’étudiants du lycée agricole de Châteaufarine et celle des personnes travaillant  dans le service des Espaces verts de la Ville de Besançon. Ce sont eux qui ont mis en culture sous serre l’ensemble des graines. Ils ont mis à notre disposition une desserte de l’Orangerie municipale dont ils se servent eux-mêmes pour cultiver une partie de leurs plantations. Coté planning : en mai, on prépare le terrain. Ensuite, on transfère et on met tout en terre pour une inauguration de l’œuvre le samedi 10 juin à 12h.

Parmi les 30 espèces qui vont composer cette horloge florale, que trouve-t-on ?

La liste a été faite par Gilles Ferrand en fonction de différentes horloges de fleurs existantes et en s’adaptant à Besançon. On a essayé de faire au maximum des espèces locales ou dont les graines se trouvent en France ou à proximité (Hollande le plus loin). On ne voulait pas entrer dans des enjeux de globalisation. Sur les 30 espèces, on retrouve, par exemple la Belle de Jour, la Carline Aucale ou l’Hémérocalle Fauve.

L’œuvre va être déployée au Parc des Glacis à Besançon. Pourquoi ce lieu ?

La forme de l’œuvre a été étudiée au fur et à mesure de l’évolution du projet. Une première lettre d’intention a été envoyée à l’été 2021. Ça fait deux ans que j’y songe et que je suis entouré de l’équipe. La forme a évolué en fonction des endroits proposés par la Ville et finalement, nous nous sommes mis d’accord sur le parc des glacis, l’extrême ouest plus précisément, à proximité de la gare. Ce qui m’a intéressé tout de suite à cet endroit, c’est qu’il est laissé en jachère. Il a un aspect brut qu’on récupère, dans lequel on s’insère et surtout, il est très ouvert sur le paysage puisque ce parc domine la ville. Besançon est en contre-bas. Au loin, il y a l’horloge astronomique dans le clocher de la cathédrale, ce qui permet d’avoir un lien visuel entre l’installation florale et ce point de départ. Ce jeu d’échelle est fascinant : entre le flux de la ville et le public qui déambule au sein de l’installation, qui regarde les fleurs mais aussi leurs silhouettes s’inscrivant dans le décor du paysage qui porte sa propre dimension temporelle. 

Ce travail a débuté comme une façon d’estimer le passage du temps. Il est devenu aussi une réflexion sur le présent comme une superposition de strates temporelles et complémentaires entre le corps du public, les fleurs…

Une application pour connaître tous les secrets de l’horloge de flore

 « Des fiches extraordinaires, rédigées par l’ethnobotaniste Gil Ferrand, permettent à chacun de se renseigner sur l’organisation complète des plantations ainsi que d’avoir un accès au plan de l’horloge » explique Marc Buchy. Un moyen de rendre accessible tous les secrets de l’horloge de flore aux visiteurs.

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