Que s’est-il passé dans les EHPAD pendant le premier confinement ?

Les EHPAD ont fait l’objet d’une triste actualité lors de la première vague de Covid-19. Des chercheurs bisontins y ont mené l’enquête pour analyser le vécu du personnel et des résidents.

Partout, la crise sanitaire a provoqué des situations inédites, mais les personnes vivant ou travaillant dans des établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) ont été particulièrement impactées.
Quatre chercheurs du Centre d’investigation clinique (CIC) du CHU de Besançon (Aline Chassagne, Hélène Trimaille, Simon Calla, sociologues, et Florence Mathieu-Nicot, psychologue) ont recueilli des témoignages pendant la première vague épidémique et après le confinement dans des établissements figurant parmi les plus touchés. Ils ont cherché à comprendre la façon dont le personnel (soignant et non soignant), les résidents et leurs proches ont ressenti et affronté cette situation.

Une véritable épreuve

Les chercheurs ont tout d’abord reconstitué la chronologie des faits, avec les premiers cas suspects, les diagnostics Covid confirmés et les premiers décès, brutaux, jusqu’au déconfinement. Dans une ambiance d’urgence générale, il a fallu agir : isoler les résidents malades ou soupçonnés de l’être, se réorganiser, réaménager complètement l’espace pour élaborer un semblant d’hôpital. Le personnel a été mis à rude épreuve : surcharge de travail, attribution de nouvelles tâches, tensions… La peur était bien présente : peur d’être contaminé, de répandre la maladie à l’intérieur de l’EHPAD, mais aussi de la ramener au sein de son propre foyer. Les relations avec les familles des résidents ont été mises à mal. L’interdiction soudaine des visites a généré de l’incompréhension. Faute de temps et de ressources humaines, le personnel n’a pas eu les moyens de faire convenablement le lien entre les personnes âgées et leurs proches. Les résidents, confinés dans leurs chambres, se sont sentis très isolés et ont manqué d’informations sur ce qui se passait autour d’eux. Certains ont appris les décès de leurs voisins tardivement, lors du déconfinement.

L’accompagnement des personnes en fin de vie a également été bouleversé. Les proches n’ont pas toujours pu venir faire leurs adieux. Les rituels funéraires et les temps particuliers qui y sont associés (toilette, habillement, présentation du corps, cérémonie) ont été perturbés. Le personnel a lui aussi beaucoup souffert de cette situation.

 

Une étude nationale coordonnée à Besançon

Tous ces témoignages sont en cours d’analyse. Cette étude, baptisée COVIDEHPAD1, dépasse largement le cadre de la Bourgogne-Franche-Comté puisque cinq autres régions (Auvergne Rhône-Alpes, Grand Est, Hauts de France, Ile-de-France et Bretagne) sont concernées. Au total, ce sont 21 chercheurs en sciences humaines et sociales de différents laboratoires qui ont mené 260 entretiens dans une trentaine d’établissements. Ces travaux sont gérés et coordonnés à Besançon par Elodie Cretin et Régis Aubry au CHU et à la Plateforme nationale pour la recherche sur la fin de vie2. Les résultats sont attendus en avril.

Régis Aubry
Régis Aubry

1 – Les financeurs de l’étude sont le Ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (MESRI), la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie CNSA et le Centre national pour la recherche scientifique (CNRS)

2 – La Plateforme nationale pour la recherche sur la fin de vie est une structure portée par Université Bourgogne Franche-Comté. Son objectif est de faire travailler en réseau des chercheurs de tous les domaines (aussi bien en santé que dans le secteur des sciences humaines et sociales) qui s’intéressent aux questions liées à la fin de vie, à la mort et aux soins palliatifs, partout en France.

Pour en savoir plus :

https://www.plateforme-recherche-findevie.fr/etude-covidehpad

 

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