#ChatonsMignons, un essai au poil
Le 4 janvier dernier, Justine Simon, Maître de conférences en Sciences de l’Information et de la Communication de l’Université Franche – Comté a publié un ouvrage aux Editions l’Harmattan. Cet essai réunit tous les concepts clés qu’elle aborde durant ses cours, à travers l’exemple du chat, l’animal domestique le plus présent dans les foyers. Il peut être destiné à un large éventail de publics : lycéen.ennes, étudiant.es, universitaires, publics curieux des transformations de notre société numérique et fans de #ChatonsMignons bien entendu !
Justine Simon parcourt avec ses étudiants la culture numérique et médiatique et notamment par le biais de réseaux sociaux. Toutes ses recherches l’ont mené à une question ; « qu’est ce qui fait qu’une image va prendre de l’ampleur, va tellement circuler qu’elle en devient virale ? ». En figure de proue de cette viralité on a les images de chats dont Justine elle-même est une grande amatrice. Ces « chatons mignons » sont repris et déclinés en masse sur Instagram, Snapchat, Twitter ou encore Tiktok et représentent un terrain d’analyse parfait pour que la chercheuse puisse y faire fleurir les graines de sa réflexion. Et puis, « le chat c’est rigolo comme exemple » sourit-elle.
Qu’est ce qui se cache derrière ces jolies frimousses
En écrivant son livre, quatre axes se sont dégagés, quatre chapitres.
On comprend que les ChatonsMignons cachent un enjeu politique notamment sur Twitter et Tiktok. C’est ce qui a le plus surpris Justine pendant la campagne électorale présidentielle ; « on utilise le chat comme moyen de positionnement politique. ». L’extrême droite utilise par exemple les images de chats dans des attaques cyniques et dures quand l’extrême gauche pouvait montrer des imageries de chats énervées pour marquer un contre discours et réagir en opposition.
On peut utiliser le chat aussi pour s’amuser dans un contexte de culture participative. « Il ‘agit de créer du lien dans un esprit de second degré. » ajoute Justine, joyeuse. Les « grumpy cats » par exemple représentent des chats avec une moue boudeuse et sont utilisés pour transmettre un discours décalé, humoristique.
D’autres fois encore « Le chat sert simplement à parler de soi, confie – elle, rêveuse, il devient une image de soi ». « Il s’agit d’ouvrir son intimité, de parler de situation vécue et le chat marque ici un pansement et permet d’attirer l’empathie. Une sociabilité numérique se crée. »
Enfin, la dernière dimension des images de chats est la dimension émotionnelle. L’émotion est partagée grâce au chat. Pour dire sa maladie, sa joie, ses réussites … Justine hoche la tête ; « Tout ce qui touche l’affecte et l’émotion est générateur de viralité. »
Pas si mignons que ça
Le phénomène qui se cache derrière ces imageries de chat est donc bien plus complexe qu’il n’y parait. « ce n’est pas juste anodin, gentillet, assure Justine, c’est une véritable économie de la part des plateformes. ». En effet derrière ses images peuvent cacher des publicités pour toutes sortes de produits, dont les chaussettes chats qu’elle porte aujourd’hui. Le chat devient un énorme gagne-pain pour les sociétés.
Justine a pu aussi se rendre compte que les réseaux sociaux peuvent créer un véritable changement d’habitude social. « C’est hyper important, réagit – elle, parce que ça conditionne notre mode de vie et le temps passé sur les écrans. » son ton assertif se marque d’autant plus quand elle me rappelle que certains de ses étudiants passent jusqu’à 13h par jour sur Tiktok.
Overdose de réseaux
Justine elle-même a dû passer un très grand nombre d’heure attachée à son écran. Il faut dire qu’elle a trouvé des mèmes en boucle dans une videos pouvant aller jusqu’à 10 heures. C’est le cas du très célèbre « chipi chipi chapa chapa doubi douba doubi douba » visionné plus de 24 millions de fois notamment dans le cadre du challenge à qui regardera la video le plus longtemps. « Pourquoi il y a tant de partage ? C’est fou, c’est le côté décalé mais ça veut quand même dire quelque chose de notre société. »
L’écriture de ce livre lui a permis de se rendre compte du rôle néfaste que peuvent avoir les réseaux sociaux. « C’est vrai que je me rends beaucoup plus compte aujourd’hui qu’il faut prendre du recul sur l’usage des réseaux même si c’est mon objet d’étude. ». Elle glousse; « dans mon cercle familiale, tout le monde en a marre des chats »
Maintenant d’autres chats à fouetter
Mais il faut bien se replonger dans les réseaux puisque Justine Simon travaille aujourd’hui sur la place de la musique en tant que moteur de viralité. « Qu’est ce qui rend une musique populaire sur les réseaux ? Est-ce que c’est plutôt le fait que ce soir une musique connue, ou son aspect ringard qui pousse à la reprise ? ».